24 July 2012

Les sangliers - 3ème partie

 Sophie se laisse glisser sur le sol. Elle a besoin de peser ses options. Rester seule ici? Elle ne s'en sent pas le courage. Rentrer chez elle? Ça ne lui apporterait rien. Vérifier les autres appartements?
La porte du garage grince. Sophie arrête ses pensées et se concentre pour écouter. "Pourvu qu'ils puissent sortir à temps" se dit-elle. Silence dans le couloir, elle se détend un peu.
Un bruit sourd résonne, c'est l'ascenseur qui descend. "Oh non s'il vous plait". Elle qui s'est toujours cru athéiste se surprend à implorer un être divin. Les portes de la voiture claquent. Le moteur se met en marche. Elle entend le bip, et devine que la voiture recule. Dans quelque secondes ils seront partis.
C’est alors que résonne le fracas des vitres qui explosent. Tandis que la voiture sortait de son abri, le tueur attendait patiemment sur le côté. Il touche les parents en pleine tête. Le hurlement des garçons fait écho dans le vieux bâtiment. D'autres coups de feu et c’est le silence complet. Assisse par terre Sophie se met en boule instinctivement. Elle prie pour que ça s'arrête. Elle va se réveiller,  se rendre compte que ça n'était qu'un mauvais cauchemar. C'est ça, ça doit être un mauvais cauchemar. Le réveil sonne.

C'est son téléphone fixe qui lui sert de réveil. Elle entend la sonnerie à travers le mur. Son répondeur se met en marche. Elle a confondu les sonneries. "Merde" lance-t-elle dans le vide. A peine le mot s'est-il écrasé sur le parquet qu'elle entend qu'on court dans l'escalier. La porte de service claque bruyamment contre le mur. Un coup de pistolet. Sa porte éclate. Elle ne peut s'empêcher de se relever pour regarder par le Judas. Elle le voit donner un coup de pied dans les débris pour rentrer chez elle. Elle ne se souvient pas l'avoir déjà croisé. Il a un beau profil, la quarantaine, plutôt musclé, le genre d’homme à qui elle ferait les yeux doux dans un bar. Il passe de pièces en pièces, la salle, la cuisine, la salle de bain, la chambre, fait claquer les portes des placards. Elle imagine ses mains pleines de sang faisant valser ses affaires dans la penderie; tachant le lit blanc alors qu'il se baisse pour regarder dessous.
A cet instant, instinctivement elle ouvre la porte. Elle sait où il est, c’est le meilleur moment pour bouger se dit-elle. Elle pose un pied sur le carrelage, glisse le long du mur sans perdre de vue sa porte d'entrée, la dépasse pour aller jusqu'à l’autre bout du couloir. Si les voisins sont là, elle a une chance, sinon son sang risque bien de se mêler au tapis rouge qui couvre le sol. 

Elle n'a même pas le temps de frapper que la porte s'ouvre, une main ferme l’empoigne, la tire à l’intérieur et referme derrière elle. Son regard fait le tour de la pièce: deux enfants sont assis sur un canapé rouge. Le plus grand joue à un jeu vidéo de formule 1 sur une console portable. L’autre regarde des dessins animés sur un petit ordinateur posé sur une table basse en verre. Tous les deux ont un casque les coupant du lourd silence qui règne dans la pièce. Un homme blond et une femme frêle, sont assis contre le dossier du canapé. A leurs postures et leurs traits, elle les imagine être les parents des petits. Un autre couple se tient debout dans le renfoncement de la cuisine américaine, ce sont ses voisins Espagnol. Elle leur fait un signe de reconnaissance.
Face à elle il y a cette jeune fille. Celle qui lui a ouvert. Brune, les yeux marrons, plutôt normale, seul son expression la différencie des autres. Comme eux, elle a peur, ça se lit sur son visage. Mais surtout elle semble être dans une colère noire. A-t-elle perdue quelqu'un? Sophie se demande comment ils se sont tous retrouvés ici.
De mon côté, je ne décolère pas. 

                                                                                                                                             A suivre...

4 comments:

  1. Anonymous12:53 pm

    Suspens suspens! Z'en veux plus

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  2. Anonymous1:15 pm

    :) Super! La semaine prochaine ;)

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  3. Avec ça : "Face à elle il y a cette jeune fille.", c'est difficile de comprendre que la fille en question est la narratrice (c'est ce qu'on fini par comprendre dans l'épisode qui suit, mais c'est quand même perturbant)

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  4. Anonymous8:32 am

    Oui je voulais justement que les gens devinent par eux-même. Je pensais que le "De mon côté, je ne décolère pas." suffirait mais - vu que tu n'es pas le seul à me faire la remarque - il semble que non.

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